Le vendredi 5 septembre dernier, j’ai eu le plaisir d’animer une conférence sur un sujet à la fois stratégique et délicat : la transition du rôle d’expert technique à celui de manager. Cette session a rassemblé un public qui partageait une même interrogation : comment réussir ses premiers pas lorsqu’on passe de l’expertise au management ?

Si cette transition paraît logique sur le papier, elle s’avère dans les faits complexe, exigeante, et profondément transformationnelle. En m’appuyant sur mon d’expérience en coaching de managers issus de l’expertise technique, j’ai partagé une feuille de route claire, des récits concrets et des outils de réflexion pour faire de cette bascule non pas une rupture, mais un point d’appui solide pour construire son management et son leadership.

I. Une transition qui se joue dès les premières semaines

On entend souvent dire qu’un nouveau manager a 100 jours pour faire ses preuves. En réalité, c’est bien moins. Dès les 3 à 4 premières semaines votre hiérarchie saura déjà si vous êtes la femme ou l’homme de la situation et l’équipe saura aussi si elle a vraiment envie de participer à cette nouvelle aventure avec vous. Dès lors, l’enjeu n’est pas seulement d’être performant, mais d’être lisible et aligné.

Ce que j’observe dans l’accompagnement des prises de poste, c’est que les managers issus de l’expertise rencontrent quatre défis fondamentaux :

  1. Clarifier leur intention managériale : pourquoi suis-je là ? qu’est-ce que je veux apporter à l’équipe ?
  2. Changer de posture : ne plus chercher sa légitimité dans le savoir-faire technique, mais dans la capacité à entraîner.
  3. Construire une roadmap opérationnelle : identifier les actions prioritaires, les « victoires rapides », et les rituels de management mobilisateurs.
  4. Installer des conversations à impact : poser un cadre relationnel clair et durable.

Ces quatre défis déterminent la vitesse, la qualité et la pérennité de la montée en puissance managériale. Rater ses premiers pas ne signifie pas l’échec, mais cela ralentit considérablement la construction de la confiance et de l’autorité.

II. De l’intention personnelle au leadership incarné

La première boussole du manager débutant, c’est son intention. Trop souvent négligée, elle est pourtant le socle invisible mais décisif de toute posture managériale efficace. Lors de la conférence, j’ai proposé aux participants de formuler en une phrase l’intention qui les anime dans cette fonction. En retour, plusieurs intentions fortes ont émergé :

  • « Faire réussir le bénéficiaire. »
  • « Créer de la confiance commune. »
  • « Faire monter en compétence les collaborateurs. »
  • « Identifier les attentes et vérifier les besoins. »

Ces formulations révèlent une volonté partagée : ne pas manager pour le statut ou la reconnaissance, mais pour impacter, élever, transformer.

J’ai moi-même vécu cette transition il y a plusieurs années, après 20 ans d’expertise technique. Ce qui m’a guidé, ce n’était pas une maîtrise parfaite des outils, mais une volonté forte de mettre la reconnaissance au cœur du management. Dans mes premiers pas de manager, j’ai par exemple introduit dans chaque réunion d’équipe un moment de gratitude collective, en posant deux questions simples :

Qu’avons-nous réussi ensemble cette semaine ? De quoi pouvons-nous être fiers ?

Ces instants d’humanité ont transformé la dynamique collective. La reconnaissance est devenue un vecteur de performance autant que de cohésion. À tous les nouveaux managers, je dis : donnez de la place à votre humanité. C’est elle qui vous donnera de la puissance !

III. Changer de posture : du contrôle à la confiance

Changer de posture ne signifie pas renoncer à l’expertise, mais la remettre à sa juste place. Le manager ne cherche plus la reconnaissance dans la maîtrise technique, mais dans sa capacité à créer du mouvement, de la clarté et de la sécurité pour ses collaborateurs.

Ce changement implique une série de déplacements internes subtils :

  • De la tâche à la relation.
  • Du contrôle au cadre partagé.
  • De l’immédiateté technique à la projection collective.
  • De la présence permanente à la prise de recul stratégique.

Un exemple illustratif de cette bascule est celui de Lucie, une cadre récemment promue responsable d’un service de 16 personnes. D’abord happée par le besoin de tout contrôler, elle a peu à peu laissé émerger une autre posture, plus ouverte, plus facilitatrice. Un tournant décisif fut lorsqu’elle décida d’impliquer son équipe dans la traduction d’un projet politique en feuille de route concrète, plutôt que de le faire seule. Elle a ainsi :

  • Défini un cadre de travail collectif,
  • Clarifié les règles de décision,
  • Et surtout, fait confiance au processus d’intelligence collective.

Résultat : une équipe mobilisée, une note stratégique co-produite, et une posture de leader affirmée.

Faire confiance ne veut pas dire renoncer au contrôle, mais apprendre à le redistribuer intelligemment.

IV. La feuille de route du manager : de la clarté à l’impact

L’intention est claire, la posture est sans ambiguïté, vous pouvez passer à l’action. Lors du webinaire, j’ai proposé aux participants une roadmap pragmatique pour les premières semaines :

  1. Clarifiez vos objectifs personnels dans cette prise de poste : que souhaitez-vous réussir ? En quoi votre réussite servira-t-elle celle de l’équipe ?
  2. Multipliez les contacts avec vos collaborateurs, vos pairs et votre hiérarchie pour cartographier les attentes et les relations existantes.
  3. Analysez la dynamique de votre équipe : de quoi a-t-elle vraiment besoin en priorité ? J’ai proposé 4 axes de questionnement. Elle a besoin d’organisation et de structure pour asseoir son action ?  Elle a besoin de cohésion et de fluidité relationnelle pour débattre sereinement et devenir une vraie équipe ?  Elle a besoin de créativité pour sortir des sentiers battus ?  Elle a besoin de créer de l’engagement pour passer à l’action ?
  4. Installez vos premiers rituels de management : réunions d’équipe, entretiens individuels, boucles de feedback, bilan de fonctionnement.
  5. Identifiez des « victoires rapides » à obtenir pour bâtir votre légitimité sans délai.

À titre d’exemple, j’ai partagé l’histoire de Victor, un expert technique devenu manager dans une entreprise industrielle. Confronté à un déficit de collaboration dans son équipe, il a choisi de construire son autorité autour de l’animation de débats collectifs. En posant des questions puissantes, en modérant les tensions, et en valorisant les contributions, il a transformé une addition d’individualités en groupe aligné autour d’un projet commun.

Ce que montre son parcours, c’est que l’autorité se construit dans l’interaction.

V. Conversations à impact : la clé du leadership relationnel

Un manager ne peut pas se contenter d’agir : il doit dialoguer, questionner, écouter, recadrer, féliciter. Les conversations managériales sont le matériau vivant de son leadership.

J’ai identifié sur le terrain en contacts avec des managers et des CODIR trois types de conversations fondamentales :

  1. Les conversations dédiées au fonctionnement de l’équipe.Cela permet de se dire les choses, de faire le point sur ce qui va bien et ce qui est à améliorer dans le fonctionnement collectif : circulation de l’information, processus de décision, climat interne, fluidité des interactions, partage des responsabilités, répartition des priorités
  2. Les conversations de développement individuel : comprendre les aspirations, fixer des objectifs, accompagner les progrès.
  3. Les conversations sur le sens et la vision : où allons-nous, pourquoi, et dans quelles conditions de coopération ?

J’encourage notamment à instaurer un « bilan de fonctionnement » dès le second mois de prise de fonction. Ces conversations, si elles sont bien menées, permettent d’accélérer la confiance, d’ajuster les postures, et de faire émerger les points de blocage latents.

Conclusion : Vos premiers pas donnent le ton

Passer de l’expertise au management est une transition identitaire autant que fonctionnelle. Ce passage demande du courage, de la lucidité et une capacité d’introspection rare. Mais il offre aussi une opportunité puissante de développement personnel et d’impact collectif.

Vos premiers pas donnent le ton : ils installent ou freinent votre légitimité, ils façonnent ou fragilisent la confiance, ils donnent envie ou inspirent le retrait. Vous ne pourrez pas tout contrôler, mais vous pouvez décider de la posture que vous adoptez, du cadre que vous posez, et des relations que vous entretenez.

Vous avez participé au webinaire ? vous découvrez cet article ? Faites un pas qui peut compter : prenons 30 minutes pour échanger sur votre situation spécifique, vos défis actuels et les leviers à actionner. Vous pouvez réserver ce rendez-vous en suivant ce lien :
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Au plaisir de cet échange

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Bruno Le Corre

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