Pour l’expert technique qui devient manager, le management est une opportunité pour booster son développement professionnel. C’est aussi un challenge exigeant pour créer la confiance, pierre angulaire de l’équipe. Sans confiance, il n’y a pas d’équipe ni de résultats collectifs. Quels sont les bons comportements à adopter pour susciter et développer la confiance ? Il n’y a pas de réponses simples et toutes faites, car cela dépend largement du niveau de maturité des équipes et des contextes.
Les écueils du micro-management et du sous-management
Le micro-management : contrôle excessif
Le micro-management est un style de management où le manager contrôle de manière très rapprochée le travail des collaborateurs. Il est très présent dans leurs activités, dictant quoi faire et comment le faire. Il est dans une posture de savoir et donne à chaque étape du processus des instructions très détaillées pour traiter les problèmes rencontrés, laissant peu de marge de manœuvre. Ce comportement est fréquent chez les super experts ayant la responsabilité d’une équipe de pairs. Le micro-management témoigne d’une difficulté à faire confiance aux collaborateurs, voire à se faire confiance en tant que manager.
Le sous-management : laisser-faire excessif
Le sous-management, quant à lui, se caractérise par un manque d’implication du manager dans les activités de l’équipe. Il ne consacre que peu ou pas de temps à ses collaborateurs, ne met pas en place de revues régulières de performance, ne fait pas de feedback… et reste transparent sur la dimension managériale. Le manager est alors très présent dans le métier de l’entreprise ou du service, mais avant tout en tant que leader expert, pas comme manager.
Ces deux comportements tuent la confiance. L’équipe est faiblement engagée et non performante.
De la crédibilité technique à la construction de la confiance
L’expert technique devenu manager doit se détacher de l’expertise technique tout en construisant la confiance au sein de l’équipe dont il fait partie. Il doit tenir ces deux aspects ensemble.
S’appuyer sur la technique pour instaurer la confiance
L’expert métier devenu manager partage souvent la même culture technique que son équipe. Cette connaissance des défis techniques facilite la communication et permet de soutenir l’équipe sans le faire à la place des experts. Cette compétence confère une crédibilité au manager, qui sait de quoi il parle et positionne l’équipe vis-à-vis des décideurs et des clients. En ne faisant pas à la place des experts de l’équipe, le manager leur donne sa confiance et suscite en retour leur confiance.
Donner un cap et le partager avec l’équipe
Le rôle du manager est de donner du sens au travail, en définissant à la fois la direction et le but ultime de la mission de l’équipe. Cela donne de la perspective et entretient la flamme de la motivation.
Exemple de Lucie : Lucie, responsable de service dans une collectivité, dirige une équipe de 16 personnes dont 4 chefs d’équipe en direct. Dans un travail collectif, ils se sont saisis d’un axe du projet politique de la collectivité et l’ont traduit en actions et comportements concrets à mettre en œuvre dans l’équipe. Ces séquences de travail ont clarifié l’objectif, permis de partager un vocabulaire commun et créé de la valeur pour la cohésion de l’équipe.
Savoir Déléguer
Le bon expert métier devenu manager sait se détacher de l’expertise technique et confier des responsabilités à ses collaborateurs. Il repère les bonnes compétences et appétences techniques des collaborateurs et délègue. Cela nécessite de la confiance en soi pour lâcher ; et de savoir donner sa confiance à ses collaborateurs.
Aller à la rencontre sur le terrain et établir une communication ouverte
Le manager doit avoir une communication claire et créer un environnement de communication ouvert. Il se rend sur le terrain, parle métier avec les membres de l’équipe, partage des moments de convivialité et respire avec l’équipe. Il encourage les réunions informelles pour renforcer les liens. Il est à l’écoute des problèmes humains qui peuvent se manifester. Chacun peut exprimer son point de vue en toute franchise. Il est écouté.
Savoir se décentrer pour permettre à chacun d’occuper sa place
Un manager avec un fort leadership peut faire de l’ombre à ses managers de proximité.
Exemple de Vincent : Vincent, responsable de l’exploitation d’équipements aquatiques et d’une patinoire, dirige une équipe de 70 personnes dont 10 managers en gestion directe. C’est un manager de cœur avec un fort leadership et une proximité avec les équipes de terrain. Cette proximité a un avantage : il connaît bien les métiers, les problèmes rencontrés par les équipes de terrain et chacun dans l’équipe. Elle a aussi un inconvénient : il est sursollicité ; et en y répondant, il empêche ses managers intermédiaires d’établir des relations de confiance et de se faire respecter dans leur périmètre de responsabilité. Vincent a appris à se décentrer pour permettre à ses managers intermédiaires de manager efficacement. Il a revu le fonctionnement des équipes et organisé une meilleure répartition de la charge de travail pour les managers et les agents qu’ils encadrent.
Dire la Vérité
Exemple d’Arezki : Arezki, directeur d’hôpital en charge des achats, logistique et biomédical, dirige une équipe de 167 personnes dont 6 adjoints. C’est un manager avec un fort leadership. Il a beaucoup de contacts avec l’équipe qu’il dirige et « aime respirer avec elle ». Il est attentif à dire la vérité, même dans les situations tendues. Il partage ce postulat de l’Élément Humain* que plus l’organisation dit la vérité, plus elle est saine et productive. Dire la vérité renforce la qualité des relations professionnelles et l’efficacité au travail.
Management et leadership, ce n’est pas la même chose
Le management consiste à planifier, organiser, coordonner et contrôler les ressources pour atteindre des objectifs définis. Le manager est une personne hiérarchiquement positionnée avec des compétences techniques et opérationnelles.
Le leadership, en revanche, est la capacité à inspirer les autres, à imaginer quelque chose qui ne s’est pas encore produit et à inviter les personnes à vous suivre dans ce voyage. Le leadership repose sur des compétences comportementales et relationnelles**. Management et leadership sont complémentaires.
Se détacher de la technique : un défi pour l’expert métier devenu manager
L’expert s’est construit professionnellement sur le savoir technique. En devenant manager, il doit se dépasser, trouver de nouveaux points d’appui, se centrer sur le relationnel avec les personnes de l’équipe et faire confiance à la relation pour régler les problèmes. Le plus souvent c’est dans la relation que le problème s’est créé et c’est dans la relation qu’il doit être résolu. Cela nécessite d’abord de la confiance en soi. Pour réussir, le manager doit prendre de la hauteurpar rapport à la situation et se voir agir comme s’il était à l’extérieur. Il peut se faire aider par un coach pour se mettre dans cette métaposition.
Remerciements
Un grand merci aux professionnels qui ont apportés leur expérience et leur point de vue ainsi que leur temps précieux sur le thème, manager quand on est un expert métier : Arezki Chérifi, Centre Hospitalier Centre Bretagne ; Lucie Chevrollier, Mauges Communauté ; Isabelle Gautier, Ville de Maen Roch ; Kevin Kergoat, Nantes Métropole, Sébastien Plonquet, Polyclinique Saint-Laurent ; Olivier Priolet, Lorient Agglomération ; Vincent Wahart, La Roche-sur-Yon Agglomération.
*L’élément humain, Comprendre le lien entre estime de soi, confiance et performance ; William Schutz. **Comment développer les soft skills de vos managers ? CLEPER, Conseil en ressources humaines, Rennes, mai 2024.